RECHERCHE

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Après le temps des expériences, vient le temps de la compréhension

Les articles publiés sur ce blog, se transformeront en chapitres dans un livre.

Un épisode d’harcèlement vécu a déclenché l’envie (ou plutôt offert l’opportunité) de reprendre des études. Le mémoire (que je qualifie d’apprenti chercheur, car telle était la volonté du fondateur, Henri SAVALL, de ce Master 2 de l’IAE de Lyon), ci-dessus, est le résultat de ces deux années.

L’application de ce mémoire dans un syndicat  a montré l’existence d’un harcèlement institutionnel, qui est devenu l’objet de mes recherches.

La recherche sur le harcèlement institutionnel s’inscrit dans la recherche mimétique, qui, elle-même, s’inscrit dans les recherches scientifiques où « les avancées scientifiques permettent d’affirmer que la croyance en Dieu est devenue rationnelle. » Qu’est l’Homme ? Quand et comment est-il apparu ?

3 articles de blogues WordPress s’inscrivant dans la recherche mimétique discutent de ces sujets. Un article Salvador LL. Imitation et attribution de la causalité : la genèse mimétique du soi, la genèse mimétique du réel : application à la « psychose naissante » et à l’autisme. Université Paris V, 1996. peut être utilement consulté, au préalable.

Hypothèse posée à partir de l’épisode, commun à trois religions CAÏN et ABEL

Ce dernier article a été abondamment commenté par, notamment ceux dont je retiens les conclusions pour ma propre recherche :  Luc-Laurent Salvador, l’auteur de la note de recherche ci-dessus et Jean-Marc BOURDIN, qui a écrit : « Durant ce million d’années, il y a eu beaucoup plus de gibiers tués que de meurtres fondateurs et cette chasse a exigé le développement de la communication verbale et non verbale, la définition de tactiques, voire de stratégies, la mise au point de javelots puis de propulseurs, la taille de la pierre, des déplacements vers des terrains giboyeux en fonction des saisons, des règles de partage des morceaux, la cuisson, la conservation, la confection de vêtements, le travail des os et de l’ivoire, etc. A mon sens, ces circonstances ont eu des effets au moins aussi décisifs sur l’hominisation que la sidération face aux victimes de meurtres collectifs.
Mais je reconnais volontiers pour les deux hypothèses que nous sommes dans la spéculation plutôt que la connaissance. Encore que la mienne, matérialiste, dispose de preuves archéologiques et paléontologiques plus évidentes !
J’ajoute que si on adopte l’éclairage biblique à la suite de Girard, Adam et Eve sont des cueilleurs, que la chute du Paradis fait songer au passage du paléolithique au néolithique quelque part en Mésopotamie et que le meurtre fondateur de la Genèse met aux prises un cultivateur et un éleveur… Il n’interviendrait donc qu’à la suite de la ratification du sacrifice d’un animal domestique par Abel et le refus de prendre en compte les prémices de céréales de Caïn. Quant aux cueilleurs Adam et Eve, on peut se demander s’ils n’étaient pas aussi chasseurs puisque Dieu avait mis à leur disposition du gibier. Les preuves que j’évoque sont les ossements retrouvés naturellement, l’extinction de certaines espèces comme les mammouths et rhinocéros laineux ou les lions des cavernes, les représentations dans l’art pariétal et mobilier : tous ces éléments démontrent, sans que personne ne le discute d’ailleurs, la centralité de la chasse au gros gibier durant l’hominisation….. Pour moi la rivalité mimétique est une réalité et les meurtres fondateurs très lointains jalonnant l’hominisation une hypothèse. Les interdits visent à éviter la rivalité mimétique et les rituels sacrificiels sont des dispositifs destinés à prévenir les crises ou à rétablir la concorde civile quand celle-ci a été mise en péril »

Des deux expériences (à La Poste et dans une copropriété confrontée à un syndic professionnel aux pratiques douteuses), j’ai abouti à une interrogation sur les concepts de la théorie mimétique, en particulier sur le bouc émissaire. Voici la phrase de René GIRARD, dans le bouc émissaire, que j’ai interrogée et que je livre à votre réflexion, avant de mettre, dans quelques jours ou semaine, sur cette page, les fruits tirés des expériences :

l’ordre violent de la culture partout révélé dans les Evangiles,….ne peut survivre à sa propre révélation. Le mécanisme fondateur révélé – le mécanisme du bouc émissaire -l’expulsion de la violence par la violence – est rendu caduc par sa révélation. Il n’a plus guère d’intérêt…

Cette phrase affirmative de René GIRARD, tirée du livre « LE BOUC EMISSAIRE » reflète l’évolution de sa pensée, depuis son livre entretien « Des choses cachées depuis la fondation du monde » où il écrivait : « Et donc que la présente thèse doit se définir comme une hypothèse. » Mais des passages laissaient présager une telle évolution, tel celui-ci : « Jean-Michel OUGHOURLIAN : A ma connaissance c’est dans les langues seulement des sociétés qui participent au vaste mouvement de déchiffrage culturel, à savoir les langues occidentales depuis la fin du Moyen Âge et bien d’autres depuis que le mot « bouc émissaire » a acquis le double sens d’institution rituelle et de mécanisme psychosociologique inconscient et spontané qu’il a toujours gardé depuis. Il faut remarquer le paradoxe…Dans l’opinion généralement admise, le rituel et le spontané sont aux antipodes l’un de l’autre..

R.G. : L’intérêt de cette conjonction …que la science ethnologique et les sciences de l’homme en général n’ont jamais officiellement reconnues : Il existe un rapport entre les formes rituelles et la tendance universelle des hommes à transférer leurs angoisses et leurs conflits sur des victimes arbitraires.

L’acte qui nous est contraire avec ses décrets, c’est la culture humaine, reflet terrible de notre violence. Il porte contre nous un témoignage que nous ne percevons même pas. Et c’est cette ignorance où nous sommes qui assoit les principautés et les puissances sur leurs trônes.

….La mort de Jésus, d’ailleurs, n’a aucune efficacité sur le plan mondain. En autorisant cette mort, le grand-prêtre n’atteint pas l’objectif qu’il s’était tracé, celui de sacrifier une seule victime pour que la nation entière ne périsse pas »

Cette dernière phrase de la citation fait référence à un passage de l’Evangile de Jean, souvent cité par René GIRARD, car c’est un argument essentiel pour la démonstration de René GIRARD. Intéressons-nous au passage complet dans Jn 11, 45-57 : Qu’allons-nous faire ? Cet homme accomplit un grand nombre de signes. Si nous le laissons faire, tout le monde va croire en lui, et les Romains viendront détruire notre lieu Saint et notre nation. Alors,…Caïphe  … « Vous n’y comprenez rien ; et vous ne percevez même pas que c’est votre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas tout entière. »  

Jean va interpréter les propos de Caïphe (véracité historique ?), en leur  donnant une dimension prophétique : « Ce n’est pas de lui-même qu’il prononça ces paroles, mais, comme il était Grand Prêtre en cette année-là, il fit cette prophétie qu’il fallait que Jésus meure pour la nation et non seulement pour elle, mais pour réunir dans l’unité les enfants de Dieu qui sont dispersés. » Cet évangile est une démonstration théologique, donc René GIRARD ne démontre rien. 

L’analyse des textes et la méthode intertextuelle de René GIRARD a certes, abouti à de grands résultats, et à l’élaboration d’un « modèle » dont une hypothèse centrale définit un meurtre fondateur et la notion de bouc émissaire.  

  Le résultat des deux expériences montre une évolution de la notion de bouc émissaire. Il existe toujours un rapport entre les formes rituelles et la tendance universelle des hommes à transférer leurs angoisses et leurs conflits sur des victimes arbitraires….Les pouvoirs établis se posent toujours la  question : « Qu’allons nous faire ? Cet homme accomplit un grand nombre de signes. Si nous le laissons faire, tout le monde va croire en lui… » Ils cherchent toujours à faire alliance (se concilier…) avec la foule (l’opinion publique, le peuple…) et savent que cette foule peut réclamer des vrais coupables. Les principautés et les puissances (dont la foule) sont  toujours sur leurs trônes. Pour éviter leur chute et celle de tous les coupables, un vrai coupable peut être livré à la foule (au tribunal…), et se transforme en bouc émissaire. Dans ce sens, Harvey Weinstein est un bouc émissaire, le cardinal Barbarin est un bouc émissaire. (Précision : cela ne remet pas en cause, bien au contraire, la légitimité et le bienfondé des actions  des journalistes Jodi Kanter et Megan Twohey, toutes deux à l’origine de l’enquête sur les abus de pouvoir et sexuels perpétrés par le producteur Harvey Weinstein et du mouvement #Moiaussi en 2018, ni celle de La Parole Libérée et du procès à Lyon du cardinal).

Ce résultat modifie le « modèle » de René GIRARD, mais ne l’infirme pas. Cette modification est cependant essentielle pour plusieurs raisons :

  1. Il explique beaucoup mieux le monde actuel (abus sexuels dans l’Eglise catholique….guerre civile génocidaire au Rwanda) : Dérives mafieuses – passage du bouc émissaire réclamé par l’opinion et qu’on lâche à la nécessité du silence puis à faire taire, par l’exclusion puis/et par des moyens plus expéditifs. Les « stratégies » individuelles s’inscrivant dans un tel contexte, exacerbe les rivalités mimétiques et …peuvent aboutir à des tragédies.
  2. Définir des politiques d’actions devient possible. L’efficacité des actions dans les deux expériences est avérée. Ces politiques (ou philosophies…) d’action doivent être intégrés dans le « modèle » modifié.