Comprendre la politique d’action de Trump avec la théorie mimétique de René Girard et la pensée de Simone Weil

Comprendre la politique d’action de Trump est possible et même facile, en lisant ce qu’écrit   PETER THIEL, celui qui a inspiré cette politique.

Dans ce livre, il écrit (extraits) : « Chaque fois que je fais passer un entretien d’embauche, j’aime bien demander ceci : quelle est la vérité fondamentale que très peu de gens partagent avec vous ?

Cette question paraît simple parce qu’elle est directe, mais en réalité, il est très difficile d’y répondre. Elle est complexe au plan intellectuel. …Et c’est une question également épineuse au plan psychologique car quiconque tente d’y apporter une réponse sait qu’elle lui vaudra d’être mal perçu. Un esprit brillant est chose rare, mais le courage est plus exceptionnel encore que le génie.

les bonnes réponses sont celles qui déchiffrent le mieux l’avenir. » Et il rajoute ce qui constitue une politique d’action « Définie en termes positifs, une start-up se compose du plus grand groupe d’individus susceptibles de se laisser convaincre de bâtir un avenir différent. La force première d’une nouvelle entreprise, c’est la nouveauté de sa pensée : plus importante encore que l’agilité, la petite taille offre un espace de pensée. »

La lecture du livre de Peter THIEL montre que la politique d’action de Donald TRUMP dépasse la guerre culturelle, portée dorénavant par le Grant Old Party. Le monde le découvre avec les nouveaux droits de douane, qualifiés à tort de guerre commerciale.

Et en deux phrases, sans le nommer, le rôle de Trump et ce qui le caractérise le mieux est dévoilé. Ce livre est un livre de gestion, appliquant les mêmes principes de la théorie mimétique que le travail qui guérit de Jean-Marc RICHARD, préfacé par Jean-Michel OUGHOURLIAN.

« Le travail qui guérit » en vedette à l’Elysée, dans le cadre de la Grande Exposition d’objets « Fabriqués en France »

. Il dégage, en plus, des lois économiques, qu’il serait passionnant d’étudier  

 Mais pour la compréhension de la politique d’action de Trump et de son administration et l’élaboration d’une politique d’action, qui ne soit pas une réaction à la sienne, cette étude n’est pas utile. Aussi, tout en recommandant sa lecture, nous n’analyserons pas ici ce livre

Depuis la nouvelle élection de Trump, Peter THIEL donne des analyses, comme celle du 10 janvier 2025 dans le Financial Times « A time for truth and reconciliation » reprise, et traduite par Le Grand Continent, qui propose son analyse de cette « L’APOCALYPSE DE DONALD TRUMP SELON PETER THIEL »

« Le retour de Trump à la Maison-Blanche augure l’apokálypsis des secrets de l’ancien régime. Les révélations de la nouvelle administration n’ont pas besoin de justifier la vengeance — la reconstruction peut aller de pair avec la réconciliation. Mais pour qu’il y ait réconciliation, il doit d’abord y avoir vérité. L’apokálypsis est le moyen le plus pacifique de résoudre la guerre menée par l’ancien régime contre Internet — une guerre qu’Internet a gagnée. … L’apokálypsis peut résoudre nos querelles. »

Quelle est cette querelle ? Dans

Screenshot

Nicolas Conquer porte-parole du Grant Old Party en France écrit « Cette élection est apparue comme l’acmé d’une guerre culturelle qu’avait déjà prophétisée Pat Buchanan à la convention républicaine de 1992 alors qu’il sortait d’une campagne primaire contre le président sortant Georges Bush père. Le mot « cultural war » définit, depuis, l’affrontement entre deux options pour l’Amérique : souhaite-elle être une nation « under god » comme l’indique la prestation de serment ou une nation entièrement sécularisée ? Cette opposition existentielle, en entrant dans le champ politique, se matérialise par des enjeux souvent très concrets…. »

Et il montre le rôle de THIEL en  racontant la conversion de JD Vance, vice-président de Trump, « Si (elle) procède donc d’un cheminement intellectuel…, elle est aussi un cheminement intellectuel. René GIRARD, universitaire français enseignant connu en particulier pour son analyse des mécanismes du bouc émissaire, lui a offert une compréhension renouvelée du christianisme comme une révélation des imperfections humaines et une invitation à l’introspection morale, plutôt qu’un simple récit légendaire. Dans l’offre religieuse globale, il perçoit alors l’originalité et la vérité eschatologique du christianisme.

…Prenant des distances par rapport à son milieu, il peut mieux l’analyser et reconsidérer les causes du malheur, qu’il juge à la fois externes (économiques) et internes (spirituelles). Les malheurs qui frappent l’Amérique ne trouveront pas de solutions dans un nihilisme élitiste, exacerbé par un capitalisme déshumanisé. Vance voit alors dans le catholicisme une solution : une tradition qui protège les enfants, soutient les familles et renforce le tissu social. Influencé par son mentor Peter Thiel, magnat de la tech et milliardaire pro-Trump, il a découvert qu’il est possible d’être à la fois chrétien et acteur du capital-risque, en interrogeant profondément le sens et les conséquences de ses actions. »

Comment Peter THIEL va décrire la politique d’action « L’apokálypsis » et démontrer qu’elle résout cette guerre culturelle :

(elle doit) « répondre aux questions les plus profondes : les causes du ralentissement de 50 ans des progrès scientifiques et technologiques aux États-Unis, la montée en flèche des prix de l’immobilier, et l’explosion de la dette publique, par des déclassifications fragmentaires de documents … La première administration Trump s’était abstenue de déclassifier parce qu’elle croyait encore à l’État profond de droit digne d’un film d’Oliver Stone. Cette croyance s’est estompée.»

Cette déclaration n’a pas été commentée, y compris par Le Grand Continent. Ces deux phrases « La première administration Trump … croyait encore à l’État profond de droit ... Cette croyance s’est estompée. » devrait représenter un bouleversement anthropologique aux Etats-Unis, mais, il n’en est rien, en fait. Ce paradoxe doit être expliqué. La culture américaine, comme l’exprime Christine ORSINI, dans

fut perçue « comme « modèle », celle de « Monsieur Smith au Sénat », qui nous a tant fait rêver » Pour les nostalgiques et ceux intéressés par la découverte d’une telle fascination, je donne à lire les deux fiches de ce film, proposées pour les « ciné-clubs » la première pour les élèves, la deuxième pour les enseignants.

Cette culture repose sur un mythe que l’un des westerns, autre genre cinématographique, reflet de  cette culture américaine, a su parfaitement représenter

« Le film est la construction d’un mythe, qui passe par la déconstruction d’un autre mythe. C’est ce qui me fascine dans ce film.  Liberty Valance c’est, presque phonétiquement, la violence en liberté, déchainée et sans entrave. Et le sénateur, incarné par James STEWART, est celui qui a réussi à soumettre cette violence à la loi, lui donnant un caractère sacré : La Légende de l’OuestSacré, car reposant sur le « meurtre » (en duel) de Liberty Valance, par  ce sénateur.

Racontant ses débuts d’avocat, s’installant dans la région de ce Liberty, le sénateur crée un autre mythe ; Celui qui a tué Liberty Valance, ce n’est pas lui, c’est le véritable héros du film, incarnant la force, croyant/converti au caractère sacré de la loi/droit, convaincu que seul cet avocat pourra l’incarner, mais sans la foi en un miracle (cet avocat ne peut vaincre Liberty VALENCE). Il devra donc tuer, (véritable meurtre prémédité) Liberty VALENCE. Le crime était presque parfait (seul ce sénateur connait son existence). Pour préserver  la légende de l’Ouest, le sénateur se rend complice de ce meurtre et se tait et ne dévoile la « vérité » qu’à la mort du héros incarné par John WAYNE. »

Christine ORSINI, dans un commentaire à son article, l’a parfaitement compris et introduit un concept de René Girard, pour l’expliquer : «« la morale du film (la fin) : « quand la légende est plus belle que la réalité, on imprime la légende ». C’est par la force et le mensonge qu’on s’est débarrassé du mal mais il faut qu’on puisse croire que c’est dans un combat loyal. Où l’on retrouve la nécessité de la méconnaissance pour fonder une communauté.

Pour se convaincre de l’importance d’un tel mythe, dans la culture occidentale (et mondiale ?), il suffit de voir le nombre de commentaires « savants » sur ce film, comme celui-ci, pour exemple (choisi pour sa durée courte, il en existe de plus d’une heure)

Pourquoi, alors, Peter THIEL, JD VANCE, tous deux admirateurs de René GIRARD, et TRUMP ne croient plus en  un état de droit profond. Aux Etats-Unis, l’influence de ce que les universitaires étatsuniens nomment « french théory » (Derrida…Bourdieu…Foucault, auxquels ils rajoutent Girard) a été considérable dans ces universités. Ces théoriciens viennent d’un pays, où ce caractère sacré du droit n’a pas cours.  Le droit est conçu comme le reflet d’un rapport de forces, l’actualité du jugement de Marine Le Pen en est le meilleur exemple. Attention ! J’ai écrit « Le droit est …un rapport de forces », je ne commente pas le jugement, qui est conforme au droit.  Attention ! Je ne commente pas, non plus, la loi, qui aurait permis l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité, mais j’écris simplement « Le droit est …un rapport de forces » en France.

Le phénomène dit « wokisme » a été engendré par ces théoriciens, il dévoile, à la société américaine, un nouveau rapport de force, dans le droit, en voulant l’imposer à cette société.

Donc deux significations à ces   phrases de Peter THIEL : « La première administration Trump s’était abstenue de déclassifier parce qu’elle croyait encore à l’État profond de droit ... Cette croyance s’est estompée. »

  1. Trump, JD Vance et Peter THIEL ne sont pas dans une démarche moraliste et de restauration des valeurs traditionnelles, mais, conformément à la théorie mimétique de René GIRARD, ils achèvent la déconstruction du caractère sacré du droit pour imposer le culte de la Force (toujours présent) dans la culture américaine.
  2. Cette pensée vient de la réaction au phénomène du « wokisme ». Il se trompe en écrivant « L’apokálypsis peut résoudre nos querelles. » Bien au contraire, et cette guerre culturelle se transforme en guerre des doubles (autre concept de la théorie mimétique) : Le wokisme et l’anti-wokisme se retrouvent dans la déconstruction et se ressemblent de plus en plus (interdiction des 200 mots dans la recherche vs quasi-obligation de les utiliser dans les recherches des universités américaines, accusation de complotisme réciproque etc.

La politique d’action, élaborée par Peter THIEL est pourtant conforme à la théorie mimétique de René GIRARD. Quand j’ai élaboré la mienne, j’ai vu cette contradiction, contrairement à Peter THIEL, aveuglé par cette guerre culturelle, où il s’est engagé. J’ai donc remis en cause certains éléments de la théorie mimétique. Dans

J’écris « Ce qu’il (René Girard) ne voit pas, c’est que les débats théologiques deviennent un enjeu de pouvoir dans la chrétienté. De ce fait, les querelles théologiques ne pouvaient que « sacrifier » l’anthropologie des Evangiles, qui devint cachée et oubliée une anthropologie ne peut être imposée, elle s’impose d’elle-même. »

Et ce que ne voit pas Girard, Thiel ne voit pas non plus qu’en écrivant ces phrases, il transforme TRUMP de politicien élu en Elu, dans un sens théologique.

Cette transformation est apparue, cachée, aux yeux de millions de téléspectateurs du monde entier, lors de la confrontation Zelensky vs Trump/Vance. Pour dévoiler le caractère sacrificiel de ce spectacle de gladiateur, il vaut mieux se référer à la chercheure ayant  la première, démontrer le caractère anthropologique des Evangiles. En effet, ses concepts, issus d’études de terrain, démontre la proximité de l’injustice et du sacrifice

« L’injustice …est une atteinte plus directe et plus profonde à l’être… Elle heurte non pas le droit, mais le sens de l’existence. Elle fait de l’autre un (non) être qui n’existe pas, qui ne compte pas.

… Et cette atteinte à l’existence prend d’abord la forme du viol du consentement. 

…La moindre pression, la moindre trace d’un rapport de force, détruit la réalité du consentement. Et c’est cette destruction qui est la mesure de l’injustice

Et, pour expliquer le caractère caché de ce sacrifice humain et la fascination exercée par ce spectacle, attisé par de nombreux commentateurs de ce spectacle (2 contre un etc.), elle écrit dans La Personne et le Sacré 

« Cette ignorance est complaisamment  entretenue, parce qu’elle flatte et contient elle aussi une volupté. Il n’y a d’autres limites à nos vouloirs que les nécessités de la matière et l’existence des autres humains autour de nous. Tout élargissement imaginaire de ces limites est voluptueux, et ainsi il y a volupté en tout ce qui fait oublier la réalité des obstacles.  C’est pourquoi les bouleversements, comme la guerre et la guerre civile, qui vident les existences humaines de leur réalité, qui semblent en faire des marionnettes, sont tellement enivrants. »

   Pour montrer que cette humiliation publique est bien dictée par une volonté sacrificielle guidée par la guerre culturelle interne aux Etats-Unis, et non par la conscience d’instaurer une politique internationale fondé sur les rapports de forces

Extrait de « Force, consentement et justice » « Traitons plutôt de ce qui est possible…Vous le savez comme nous : tel qu’est constitué l’esprit humain, ce qui est juste est examiné  seulement s’il y a nécessité égale de part et d’autre. Mais s’il y a un fort et un faible, ce qui est possible est imposé par le premier et accepté par le second »

Les Méliens dirent qu’en cas de bataille ils auraient les dieux avec eux à cause de la justice de leur cause. Les Athéniens répondirent qu’ils ne voyaient aucun motif de le supposer.

« Nous avons, à l’égard des dieux, la croyance, à l’égard des hommes la certitude, que toujours, par une nécessité de la nature, chacun commande partout là où il en a le pouvoir…Nous savons bien que vous aussi, comme tous les autres, une fois parvenus au même degré de puissance, vous agiriez de même »

Ainsi parlent dans Thucydide des Athéniens venus porter un ultimatum à la malheureuse petite cité de Mélos. »

Il y a deux façons de réagir à ces deux phrases :

  1. L’appliquer : Simone Weil écrit plus loin « L’action humaine n’a pas d’autre règle ou limite que les obstacles. Elle n’a pas contact avec d’autres réalités qu’eux. … Un homme est susceptible d’imposer des obstacles par un pouvoir de refus … Quand il ne le possède pas, il ne constitue pas un obstacle, ni par suite une limite. Relativement à l’action et à celui qui l’accomplit, il n’a pas d’existence… » Zelensky n’était pas un obstacle pour Trump, dans l’application de son action vis-à-vis de la guerre en Ukraine, le théâtre du bureau ovale n’avait donc pour but que l’humiliation publique d’un homme érigé en héros par le camp opposé de cette guerre culturelle. Poutine a, lui, parfaitement compris, après ce spectacle, la faiblesse de Trump, qui accorde une existence à Zelensky. Il fait donc attendre son accord à un cessez-le-feu. Et il sait qu’il a une carte maitresse : Profiter de la rivalité Chine vs Etats-Unis.
  2. L’autre façon est exprimée clairement par Simone Weil : « Ces deux phrases sont de celles qui choquent les bonnes âmes. Mais tant qu’un homme n’en a pas éprouvé la vérité dans la chair, le sang et l’âme toute entière, il ne peut pas encore avoir accès à l’amour de la justice. » Poutine n’a pas cet amour car il n’en a pas éprouvé la vérité…, mais il a éprouvé son efficacité, l’ayant appliquée jusqu’au bout, de nombreuses fois.  

Il n’y a pas de troisième façon, C’est pourquoi, la deuxième façon étant, par sa définition rare, l’achèvement assumé de la déconstruction du  caractère sacré du droit aux Etats-Unis, en révélant que le droit est, comme en France, un rapport de forces, fascinent tant les commentateurs qui s’arrêtent à l’analyse de l’application de l’action du « Droit de plus fort »

Sur le blogue l’Emissaire

Paul DUMOUCHEL analyse « cette étrange rencontre avec Zelensky dans  le Bureau ovale… Il fallait qu’il s’humilie en abandonnant toutes garanties de sécurité, qu’il accepte de faire une confiance aveugle à celui qui ne serait son protecteur qu’à ce prix. Ce qu’il a refusé de faire. Quel était le but de l’humiliation publique de Zelensky qui s’ensuivit ? L’humilier publiquement rien d’autre. »

Jean-Louis Salasc écrit avant cette rencontre. Il  est stupéfait de voir l’opinion publique occidentale se déchaîner contre Donald Trump, communier dans des séances de détestation collectives à son encontre, alors qu’il est le premier, et le seul, à annoncer vouloir la fin de l’hécatombe en Ukraine. Et ajoute « Les Etats-Unis ont non seulement soutenu cette guerre ces trois dernières années, mais ils l’ont aussi souhaitée. »

Ces deux articles (plus ceux d’Hervé VAN BAREN « Regards croisés sur Donald Trump » et « René Girard peut-il être récupéré ? ») Illustrent bien que la deuxième façon de réagir est rare. De ce fait, la fascination exercée par Trump est expliquée. Les analyses sont contradictoires, aucune action n’est possible « Un homme est susceptible d’imposer des obstacles par un pouvoir de refus que parfois il possède et parfois non. Quand il ne le possède pas, il ne constitue pas un obstacle, ni par suite une limite. Relativement à l’action et à celui qui l’accomplit, il n’a pas d’existence » (Simone Weil, Force, consentement et Justice).

Jean-Louis Salasc a raison : « Trump est le premier, et le seul, à annoncer vouloir la fin de l’hécatombe en Ukraine ». Paul DUMOUCHEL a raison « le but de l’humiliation publique de Zelensky était de l’humilier publiquement. Il a, de nouveau, raison, quand il écrit « C’est avec un savoir-faire sans faille que Trump dès le début s’est offert comme la cible de nos ressentiments… Il suffirait que nous regardions ailleurs pour qu’il disparaisse comme une baudruche qui se dégonfle »

Cette dernière phrase est la clé pour comprendre « le savoir-faire… de Trump » et « notre incapacité à regarder ailleurs », il suffit de reprendre les phrases de Simone Weil « Il n’y a d’autres limites à nos vouloirs que les nécessités de la matière et l’existence des autres humains autour de nous. Tout élargissement imaginaire de ces limites est voluptueux, et ainsi il y a volupté en tout ce qui fait oublier la réalité des obstacles. »

Ce savoir-faire n’est pas sans faille, car, et c’est une contradiction majeure dans l’analyse de Peter THIEL, Trump est touché, lui-même, par ce phénomène et  a oublié la réalité des obstacles, lorsqu’il a humilié Zelensky.

Comment échapper à la fascination de la Force, porte d’entrée du totalitarisme (cf. les textes, rassemblés par Pascal David dans Simone Weil, Désarroi de notre temps et autres fragments sur la guerre, Peuple Libre, 2018),et  élaborer sa propre politique d’action.Si elle est une réaction à celle se revendiquant de la Force, la théorie mimétique nous apprend que, dans ce cas, la fascinationaugmente…

Un exemple de politique d’action, pour ceux qui doutent de sa possibilité est donné dans l’article

Le constat d’une comptabilité frauduleuse date de 1992. Le début de mon action date de 2017, lorsqu’une copropriétaire sollicite mon aide. Cette action est une suite de refus, créant des obstacles, qui oblige les syndics successifs à réagir, dévoilant, aux yeux de plus en plus de copropriétaires, cette comptabilité frauduleuse. Pour en finir, le dernier syndic, aveuglé par l’obstacle que je représente, décide de me « sacrifier ».

Sa stratégie fut la justice, conçue comme un rapport de force.  Mais il ne s’occupa plus de la gestion de la copropriété, négligea les autres copropriétaires et se fit, donc, remercier au profit d’un syndic honnête, de proximité et décidé à mettre fin à toute comptabilité frauduleuse. Cette comptabilité frauduleuse (et son étendue) est maintenant définitivement  prouvée, et le nom du syndic n° 1 en France associé, publiquement, à une telle pratique (qu’un procès ait lieu ou non).

René Girard a donné les outils pour théoriser une politique d’action sans Sacrifice Humain et  Simone WEIL a « théorisé » la pratique d’une telle politique «  Un homme est susceptible d’imposer des obstacles par un pouvoir de refus » et tant qu’il « n’en a pas éprouvé la vérité dans la chair, le sang et l’âme toute entière », il ne verra pas ce pouvoir et ne pourra imposer des obstacles.

A l’échelle des pays, il est possible d’adapter  la dernière phrase citée de Simone Weil « Des Nations ont éprouvé la vérité (des 2 phrases de Thucydide) dans leur chair » Elles sont européennes. Un trio d’hommes politiques s’est formé  Et un trio d’hommes s’est formé : Alcide de Gasperi, Konrad Adenauer et Robert Schumanqui vont, cinq après une guerre mondiale qui a saigné leurs pays respectifs, posé les bases d’une réconciliation et d’une coopération (le marché commun). Seul Robert Schuman a pu prononcer un discours et être, ainsi, considéré comme le Père de l’Europe, mais il est important de ne pas oublier les deux autres dont l’âme de leurs pays a été brisée.

Leur politique d’action les conduisait à ne surtout pas privilégier  la politique : « Cet ensemble ne pourra et ne devra pas rester une entreprise économique et technique : il lui faut une âme, la conscience de ses affinités historiques et de ses responsabilités récentes et futures, une volonté politique au service d’un même idéal humain ». (Propositions « Robert Schuman pour l’Europe » manifeste publié sur le site de l’Institut Robert Schuman)

A ce trio, Konrad Adenauer a associé Charles de Gaulle, signant en 1963 le traité de l’Élysée de coopération France-Allemagne, montrant que la conception de l’Europe entre ce trio et De Gaulle n’était pas éloignée, et surtout que ce traité de coopération est un moyen d’acquérir cette conscience et âme.

Quand on réalise une analyse d’une guerre, on se doit de prendre tous les  éléments essentiels, la géographie en est un, très important, et certainement le plus pertinent, car il permet de voir l’absurdité de certaines thèses exprimées par les présidents avant Trump et surtout ceux que l’on a appelé les « néo-conservateurs », dont le principal représentant a été Zbigniew Brzezinski, ancien secrétaire d’état, qui a popularisé  sa doctrine (la « doctrine Brzezinski »), dans un  ouvrage« le Grand Echiquier », paru en 1997.  Jean-Louis Salasc dans un article de 2022 :

en cite certains passages de ce livre, après avoir rappelé que cette thèse reste d’actualité, comme en témoigne l’article-programme de Victoria Nuland  en août 2020, six mois avant sa nomination comme secrétaire d’état adjoint : « L’Ukraine est un champ de bataille que les Etats-Unis ne doivent pas céder à Poutine. »

« L’Eurasie demeure l’échiquier sur lequel se joue la primauté mondiale ».

« L’Europe est la tête de pont géostratégique fondamentale de l’Amérique ».

« L’Europe de l’Ouest reste un protectorat américain et ses états rappellent ce qu’étaient jadis les vassaux et les tributaires des anciens empires ».

Et enfin, dans un remarquable effort d’humilité : « Pour la première fois dans l’histoire, un état unique est devenu une véritable puissance globale ; pour la première fois dans l’histoire, un état non eurasien domine le monde ; pour la première fois dans l’histoire, la scène principale du monde, l’Eurasie, est dominée par un état non eurasien ».

En  version grand public, cela donne la célèbre phrase de Bill Clinton, reprise par Barak Obama : « Les Etats-Unis sont la nation indispensable » …

Si nous regardons une mappemonde, sa doctrine  les Etats-Unis ne sont pas le centre des échanges entre l’Europe et l’Asie (via le Pacifique). Mais si la Russie (à l’époque rivale aussi de la Chine) est détachée et ennemie de l’Europe, les Etats-Unis peuvent être considérés comme le centre et comme le « suzerain » des pays européens, les protégeant de la Russie.  Ces anciens présidents ont pourtant constaté la « montée en puissance de la Chine ».

Trump et ses conseillers ont la même mappemonde.  Il est, donc, facile de voir l’absurdité d’une telle doctrine, conduisant la Russie à s’allier à la Chine, et non à rivaliser avec  elle.

Pour nous européens, savoir que nos dirigeants  ont la même mappemonde, mais ont été incapables de voir l’absurdité d’une telle doctrine, et ont, cependant, participé au  sacrifice de l’Ukraine, nous rendent responsables de ce sacrifice. D’ailleurs n’est-ce pas ce que dit, sous les acclamations, Claude Malhuret au Sénat, le 1er Mars 2022 : «Le peuple ukrainien [est] prêt au sacrifice pour défendre sa liberté et la nôtre, sa démocratie et les valeurs européennes qu’il partage ». Encourager ainsi un peuple à se sacrifier revient à participer à son sacrifice (commentaire de Denis Monod-Broca dans l’article de Jean-Louis SALASC « business as usual »)

Face à un tel aveuglement, Trump/Thiel ont réagi par des questions Pourquoi ?

Cet article  a pour but de vous amener à comprendre que cette question est non seulement sans intérêt, mais qu’elle conduit à  la généralisation des systèmes sacrificiels sur la planète guerre.

  1. Aucune réponse ne sera donnée !
  2. Les questions, sans réponse des dirigeants auxquelles elles s’adressent, vont s’accumuler !
  3. Les réponses seront cherchées et trouvées (par Thiel et l’équipe de Trump). Ils voudront la révéler (cf. article « Le retour de Trump à la Maison-Blanche augure l’apokálypsis. » de peter THIEL).
  4. Vraies ou fausses, elles sont qualifiées de complotistes.
  5. La rivalité s’emballe, la guerre culturelle s’étend et on oublie le sacrifice des Ukrainiens, qui perdure.

Aucun dirigeant européen, même (et surtout ?) Zelensky (il a annihilé sa résistance à la sortie du bureau ovale, en acceptant cette humiliation publique/injuste) ne peuvent  agir.

Ce sont les citoyens européens, responsables de ce que pense, dit et fait l’union européenne, qui peuvent crier. « Que l’Ukraine vive ! »

A l’image de Pascal Santoni, qui écrit dans La Vie Nouvelle, revue des retraités CGT

« S’il y a urgence, c’est bien d’arrêter la guerre en Ukraine qui a déjà coûté près d’un million de morts et des destructions qui vont gravement impacter la vie et l’avenir des Ukrainiens. Arrêter les hostilités et garantir durablement la sécurité de l’Ukraine, mais aussi de la Russie, ce devrait être l’obsession des dirigeants européens… »

Et invite Pascal Boniface « L’Ukraine …ne peut gagner militairement ce conflit. …La Russie est affaiblie…Il n’y a pas d’issue militaire »

Conclusion : En appliquant les principes de René GIRARD, Thiel et Trump n’ont pas réussi à s’extraire de la guerre culturelle.

Aux époques de changements profonds (ou même bouleversements) anthropologiques, les rivalités s’exacerbent, ce qu’a démontré René GIRARD. Peter THIEL a essayé d’élaborer une politique d’action, à partir de la théorie de René GIRARD. Mais, dès qu’il y a politique/enjeu de pouvoir, la raison est sacrifiée et la guerre des doubles s’intensifie.

Pour que des raisonnements économiques et gestionnaires soient écoutés et surtout discutés dans chacun des camps, il faut au préalable, trouver une anthropologie commune. Cette volonté existe dans chaque camp de cette guerre culturelle. Mais ceux qui sont, à même d’y parvenir dans chaque camp, seront qualifiés de « bisounours » et « sacrifiés ».

La seule anthropologie commune possible est le refus des sacrifices humains. C’est la raison de cet article.

S’il n’y a pas d’anthropologie commune, la recherche d’arguments pour réduire les incertitudes économiques actuelles et les « guerres commerciales » est vaine. Les lois économiques s’appliquent « toutes choses égales par ailleurs », donc avec une anthropologie commune. Après, nous pourrons étudier celles de Peter THIEL

Si cette guerre culturelle, dans laquelle, nous l’avons vu, sont impliqués les dirigeants européens, devait perdurer, les conséquences sont prévisibles. La Chine est un pays/empire avec un système sacrificiel, la Russie a le culte de  la force. Le camp occidental risquerait de tomber dans ce « culte de  la force ».

4 commentaires sur “Comprendre la politique d’action de Trump avec la théorie mimétique de René Girard et la pensée de Simone Weil

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