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Julie DACHEZ est une chercheure professionnelle, femme autiste qui, de sa thèse, a tiré un livre où elle interview des autistes. Lisez-le, si vous vous intéressez à l’autisme. Son site :
Comprendre l’Autisme | Julie Academy
Mais, dans ma bulle, je ne savais pas que les neurones miroirs avaient suscité un énorme enthousiasme, et attiré des chercheurs. Bien que la découverte des neurones miroirs, par Giacomo RIZZOLATTI, soit récente (1993), certains de ses chercheurs sont arrivés à des conclusions hâtives, créant ainsi un engouement pour ces neurones miroirs, et au-delà pour les neurosciences, dangereuses.
En effet, suite à mes articles évoquant les neurones miroirs, avec prudence mais en les illustrant par une image renvoyant à une théorie des neurones miroirs « sujette à caution », une réaction m’interpella ; « Je suis autiste, mais pas comme toi avec un déficit des neurones miroirs, car je suis capable de prévoir ce que fait un autre »
C’est l’illustration de ce que j’ai écrit plus, certains de ses chercheurs sont arrivés à des conclusions hâtives. Giacomo RIZZOLATTI a d’ailleurs participé à cet engouement, comme le montre cet article
Pour revenir à une saine conception, il est bon de revenir à la réalité : La découverte des neurones miroirs ne fait pas suite à l’application d’une théorie existante, mais à une grande part de hasard. Comme le montre l’article ci-dessus, elle a permis de corriger certaines notions physiologiques du cerveau, jusque-là en vigueur (aire de Broca). Cet aspect a été d’ailleurs développé par deux chercheurs italiens. Ceux, intéressés par ce développement peuvent, utilement consulté l’article, dont les références sont : FADIGA Luciano, CRAIGHERO Laila, « Chapitre 11. Représentation des actions de la main et du langage dans l’aire de Broca : le rôle des neurones miroirs », dans : Christian Hervé éd., Psychose, langage et action. Approches neuro-cognitives. Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, « Neurosciences & cognition », 2009, p. 191-200. DOI : 10.3917/dbu.dagog.2009.01.0191. URL : https://www.cairn.info/psychose-langage-et-action–9782804120702-page-191.htm
Pour une aide à ce retour, vous pouvez visionner la vidéo ci-dessous. Elle est longue et n’est pas indispensable à la lecture de cet article. Mais vous vous priveriez d’une conférence passionnante, de la part d’un neurologue praticien, avec une analyse de tableaux célèbres, vus à travers une analyse mimétique.
Dans un article de la revue citée plus haut, mais chapitre 9 ZALLA Tiziana, LABRUYèRE Nelly, « Chapitre 9. Neurones miroirs et autisme », dans : Christian Hervé éd., Psychose, langage et action. Approches neuro-cognitives. Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, « Neurosciences & cognition », 2009, p. 149-166. DOI : 10.3917/dbu.dagog.2009.01.0149. URL : https://www.cairn.info/psychose-langage-et-action–9782804120702-page-149.htm
Ces chercheures citent plusieurs études neurophysiologiques et d’imagerie cérébrale ont avancé l’hypothèse selon laquelle une atteinte du système des neurones miroirs serait à l’origine des déficits comportementaux et cognitifs de l’autisme. Elle cite la plus célèbre : Oberman et collaborateurs (2005) ont montré que des sujets contrôles présentent une suppression du rythme mu (Le rythme mu est un signal EEG localisé dans la région centro-temporale. Dès que le patient bouge ou imagine un mouvement, il disparaît.)
Le principal rythme visible correspond à la zone motrice des mains à la fois quand ils bougent leur propre main et quand ils observent un mouvement d’une main, alors que la suppression du rythme mu n’est observée chez les personnes avec autisme de haut niveau uniquement quand ils réalisent le mouvement et non quand ils l’observent.
Ces études, qui ne sont pas à remettre en cause en tant qu’études, souffrent d’un biais, qui fausse l’interprétation de leurs résultats. Elles (ces études) cherchent à expliquer « les déficits comportementaux et cognitifs de l’autisme ». Le biais est aussi important chez RIZZOLATTI, qui écrit, dans sa communication (à lire et à télécharger, voir plus haut) : « Finalement, la découverte des neurones miroirs a également un impact sur la compréhension de certaines pathologies mentales, telles que l’autisme ou la schizophrénie ». Oberman en vient à valider, par ce biais, la théorie de l’esprit, maintenant remise en cause (voir la conférence de Benoit KULLMANN ou la formation « comprendre l’autisme » de Julie Dachez)
Le mérite de ZALLA Tiziana, LABRUYèRE Nelly est de passer en revue toutes les recherches sur les neurones miroirs, dont les leurs (en préparation en 2009, mais je n’ai pas encore trouvé leurs résultats), qui conduisent à une conclusion très instructive :
« , un dysfonctionnement du système miroir a été présenté comme étant à l’origine des troubles cognitifs dans l’autisme. Néanmoins, cette hypothèse qui devrait rendre compte des troubles d’imitation, de la compréhension des intentions ainsi que de la complexité et de la variété des difficultés sociales, demeure très controversée. Comme nous l’avons remarqué dans cet essai, l’une des objections majeures adressées à cette théorie relève à la fois de la pénurie de données empiriques et de l’absence d’une définition claire des fonctions cognitives accomplies par les neurones miroirs. Alors que dans sa formulation originale, les neurones miroirs étaient censés s’activer par résonance directe lors de l’observation de l’action d’autrui et servir principalement les fonctions d’imitation et de compréhension de l’action, plus récemment ces mêmes neurones semblent impliqués dans la coordination et l’anticipation de chaînes d’actions logiquement reliées, ainsi que dans la prédiction de ces mêmes actions chez autrui. À présent, la difficulté à combiner différents modèles fonctionnels dans un seul système neural rend la théorie des neurones miroirs inadéquate à expliquer des fonctions cognitivement complexes, telles que l’imitation, la prédiction et la lecture des intentions chez autrui. En raison de ces considérations, il est d’autant plus difficile d’évaluer leur rôle explicatif dans la compréhension des troubles cognitifs et sociaux de l’autisme. »
Ces recherches dans ses nouvelles sciences cognitives ne gagneraient-elles pas à intégrer la méthodologie de Julie DACHEZ ? Ne peut-on remarquer comme Daniel ANDLER, « COGNITIVES SCIENCES », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/sciences-cognitives/ que, dans son effort pour faire exécuter à l’ordinateur des raisonnements complexes, qu’il s’agisse de jeu d’échecs, de compréhension de textes, de démonstration automatique de théorèmes ou de systèmes experts, l’intelligence artificielle a eu tôt fait de constater que, pour éviter l’explosion combinatoire provoquée par l’exploration systématique de tous les cas possibles, il fallait introduire dans les programmes des règles dites heuristiques, qui orientent la recherche dans une direction plus prometteuse.
Les lecteurs pourraient me faire remarquer que ces études doivent expliquer le comportement conscient et la vie mentale d’un individu humain, et le fait d’écouter les autistes est un biais. Mais ces études, distinguant souvent les autistes soit disant à haut potentiel, s’aperçoivent, à la fois que les réactions neurologiques sont les mêmes et que leurs distinction les empêchent de tirer des résultats sur les déficits cognitifs. C’est ainsi que le rôle des neurones miroirs a dû être revu.
La réaction « Je suis autiste, mais pas comme toi avec un déficit des neurones miroirs, car je suis capable de prévoir ce que fait un autre » est pertinente, mais erronée, parce que, moi aussi, je suis capable de prévoir ce que fait un autre.
Cela veut simplement dire que, comme tous les autistes interviewés dans le livre de Julie, j’ai dû m’adapter. Et donc que nous avons mobilisé des circuits neuronaux pour se faire.
Je suis persuadé que l’étude de ces circuits neuronaux peuvent non seulement mieux comprendre les neurones miroirs, mais aussi, probablement mettre à jour un système de neurones miroirs, avec probablement un ou des systèmes connexes (ceux qui permettent aux autistes une adaptation).
En ce qui me concerne et avant de publier sur la page recherche du site que je gère (je ne me compare pas aux chercheurs professionnels cités ici) des résultats me semblant intéressant pour la recherche mimétique, je révèle que j’ai largement exploré cette possibilité.
AUTRES RÉFÉRENCES utilisées pour les besoins de cet article
Philippe GAUSSIER, « ROBOTIQUE ET PSYCHOLOGIE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/robotique-et-psychologie/
Henri LEHALLE, « SIMULATION ET DÉVELOPPEMENT (psychologie) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/simulation-et-developpement/
Chrystel BESCHE-RICHARD, Raymond CAMPAN, « COGNITION », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/cognition/
Eva-Maria GEIGL, Thierry GRANGE, Bruno MAUREILLE, « GÉNOME NÉANDERTALIEN », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/genome-neandertalien/
Marie-Ève HOFFET, « AUTISME (PRISE EN CHARGE DE L’) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/autisme-prise-en-charge-de-l/#c88917
André GUILLAIN, « IMITATION, psychologie », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 3 mars 2023. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/imitation-psychologie/
Un commentaire sur “Les neurones miroirs et autisme : Mythe ou réalité ?”